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JOURNÉES NATIONALES DE DIALOGUE ET D’lNITIATIVES

Conakry, les 12, 13, 14 Aout 2008

Thème : INTEGRATION ECONOMIQUE ET MONETAIRE EN AFRIQUE DE L’OUEST

1. Introduction

La théorie économique fait des emprunts aux disciplines de la connaissance, en particulier aux sciences expérimentales et aux mathématiques.

Cette approche qui porte le nom de multilinéarité est à la fois commode mais donne une illusion scientiste, génératrice de crise. Passons sur les conséquences scientistes sur la régulation économique et faisons comme si l'économique, objet de la théorie économique est facile à délimiter au même titre que les matières.

Par analogie, l'intégration économique et monétaire est la mise en cohésion de plusieurs économies pour créer un espace économique unique, doté d'une monnaie unique qui a court forcé et pouvoir libératoire de tous les pays de l'union.

Depuis longtemps, le consensus se réalise progressivement au tour du fait que l'Afrique en général et en particulier l'Afrique de l'Ouest, doit accélérer sa marche vers l'intégration, en raison du fait que ce siècle qui commence se caractérise par la mondialisation et l'émergence des grands blocs économiques, qui ont pris heureusement la place de la guerre froide.

Ces deux réalités qui ont inauguré le 3ème millénaire ont entrainé une compétition internationale entre les grands ensembles.

A cet égard, la solidarité qui a longtemps prévalue au sein de l'alliance atlantique, face à la menace soviétique a cédé de manière irréversible sa place à une ne vive compétition entre les nations ayant une tradition d’économie de marché.

Les effets positifs de ses transformations structurelles seront capitalisées par les économies qui ont réussit l'unité et forger des bases institutionnelles solides adaptées aux exigences de la nouvelle donne internationale.

La sphère ouest Africaine doit prendre conscience de l'impérieuse nécessité de se regrouper pour réussir son arrimage économique aux solidarités émergentes. C'est la seule solution pour corriger une marginalisation économique visible dans ce fait inquiétant: l’Afrique subsaharienne fait au plus 1 % du commerce international.

L'Afro pessimisme, ce doute envers le destin de l'Afrique, a d'abord une filiation économique qui réside dans la faiblesse notoire de la contribution de notre continent aux échanges internationaux.

A l'image de l'organisme humain qui effectue un parcours qui commence du fœtus à l'adulte, ce long cheminement est jalonné d'étape intermédiaire dont chacune étant un état transitoire satisfaisant par rapport aux états antérieurs, mais appelé au dépassement. Les plus significatives sont:

  • Association du commerce préférentiel
  • La zone de libre échange
  • L'union douanière
  • Le marché commun
  • L'union économique
  • L'union économique et monétaire

Notons que chaque étape est en soi une intégration qui nous conduit à affirmer que l'intégration est le résultat d'un processus.

II. Définition des étapes constitutives de l’intégration économique et monétaire

Donnons en premier lieu une définition succincte de ces cinq étapes conduisant à l'union économique et monétaire qui est la forme d'intégration la plus poussée.

1. Association du commerce préférentiel

Il s'agit d'un groupe de pays qui réduisent les tarifs douaniers entre eux tout en maintenant les tarifs plus élevés entre eux et les autres pays.

2. Zone de libre échange (ZLE)

Une ZLE est une intégration dans laquelle les états décident de supprimer entre eux les cordons douaniers, mais chacun garde la liberté de fixer son tarif l'égard du reste du monde. A l'évidence, cette forme d'intégration stimule les échanges entre les pays à un niveau supérieur à celui existant avant la ZLE.

Toutefois, la diversité des niveaux de tarif fait que dans une ZLE, il ya un détour de trafic en faveur des états ayant un tarif plus faible, entrainant une baisse des recettes douanières des états à tarifs élevés.

3. Union douanière (UD)

Dans une Union Douanière, les barrières tarifaires sont toujours supprimées entre les états, mais tous adoptent un tarif extérieur commun à l'égard du reste du monde, en vue de corriger les déséquilibres financiers qui ont entrainé le déclin de la ZLE.

Toutefois, dans une UD, les états gardent une indépendance totale dans la mise en application de leur politique économique et de contrôle des mouvements de capitaux.

4. Le marché commun (MC)

Le MC reconduit le dispositif du tarif extérieur commun et le complète en supprimant les restrictions nationales relatives aux mouvements de capitaux.

5. Le marché unique (MU)

Le MU ajoute à l'arsenal du MC la convergence des politiques économiques qui baignent dans un système monétaire caractérisé par la multiplicité des monnaies avec des risques de change gérés par les agents économiques.

Les critères de convergence pour l'UEM en Afrique de l'Ouest (UEMAO) sont au nombre de quatre; ils ont étés fixés à la suite de la conférence des Chefs d'Etats des pays de l'Afrique de l'Ouest tenue en 1983 à Conakry, qui a fixé comme objectif la réalisation d'une zone monétaire unique de Ia CEDEAO à l'an 2000.

On est en l'an 2008, c'est-à-dire 25 ans après, la situation est la même.

Ces critères sont :

  • Une variabilité du taux de change de 10%
  • Un taux d'inflation de 9%
  • Un déficit budgétaire par rapport au PIB de 5%
  • La plateforme du financement monétaire du déficit budgétaire par la Banque Centrale de 10%. Celle de notre BCRG avoisine 80%.

6. L’union Economique et monétaire (UEM)

L'UEM qui est la phase finale de l'intégration. C’est un MU dans lequel les monnaies nationales sont remplacées par une monnaie unique, ou des monnaies nationales liées par des taux de change fixes et irrévocables, pour éliminer les risques de changes inhérents à un MU.

a.- L'apport de la théorie académique

La théorie des zones monétaires optimales (ZMO) élaborée par Robert Mundell apporte un éclairage sur les conditions de réussite d'une union monétaire.

Rappelons qu'une zone monétaire a trois caractéristiques essentielles: la définition de la parité entre les monnaies, les modalités de défense des parités, le mécanisme d'ajustement.

Admettrons une union monétaire dans laquelle coexistent des monnaies dont les parités les unes par rapport aux autres sont fixées par les banques centrales vont aussitôt élaborer d'une part des modalités de défense des parités lorsque des divergences apparaissent, c'est-à-dire lorsque les parités s'éloignent de celles fixées par le traité d'union monétaire, et, d'autre part, un mécanisme d'ajustement des déficits de balance des paiements.

Les conditions de réussite d'une union monétaire dans laquelle plusieurs monnaies sont liées par des taux de change que les Etats souhaitent irrévocables, sont énoncées par la théorie des ZMO de Mundell qui sont.

  • La totalité des facteurs productifs (capital et main d'œuvre)
  • Flexibilité des salaires
  • Convergence intégrale des politiques économiques et intégration des marchés financiers
  • Proximité géographique entre pays de l'Union

Pour mettre en évidence l'intelligence de cette théorie, supposons qu'un pays de l'union mette en œuvre une politique de lutte contre le chômage par la relance des dépenses publiques, dans un contexte sans mobilité des facteurs de production en particulier la main d'œuvre.

b. L'apport des expériences concrètes d'intégration

Les pays de l'Afrique de l'Ouest peuvent tirer de riches leçons de l'expérience de la longue et difficile marche des états occidentaux, depuis le traité de Rome en 1957 jusqu'à son point d'achèvement, l'Euro, qui a fait son entrée en janvier 2002 dans la vie quotidienne de 400 millions d'âmes.

c. Les savoir faire accumulés par les banques centrales de l'UEMOA dans le domaine de la gestion concertée des réserves de change

Actuellement, les pays de l'Afrique de l'Ouest ont à faire un choix entre deux réalités claires et tranchées:

  • Elargir la zone CFA à l'ensemble des pays de l'Afrique de l'Ouest
  • Créer une zone monétaire qui absorbera la zone CFA, tout en utilisant l'expérience séculaire accumulée par les banques centrales dans le domaine de la mise en commun des réserves de change et de la gestion concertée des politiques monétaires.

d.- L'apport des politiques de stabilisation et de réformes structurelles inspirées par le FMI et la BM.

L'adoption par tous les pays d'Afrique de l'Ouest depuis la décennie 80 de programmes de stabilisation et de réformes en accord avec le FMI et la BM a favorisé la réalisation des critères de convergence tels que fixés par la conférence de Conakry.

Toutefois, des obstacles sérieux que nous pouvons mettre en deux catégories contrarient la marche nécessaire de l'Afrique de l'Ouest vers l'intégration économique et monétaire.

III. Les obstacles

1. Les Obstacles économiques et financiers

Le panorama que nous offre les pays de l'Afrique de l'Ouest pris dans leur totalité est dominé en premier lieu la faiblesse du niveau des indicateurs sociaux tels que l'éducation et la santé.

Aussi, les investissements dans les infrastructures physiques (routes, électricités, télécommunications) n'ont pas atteint un niveau suffisant pour mobiliser le potentiel de croissance de l'Afrique de l'Ouest.

La croissance réelle dans chaque pays se fait à un taux constituant l'offre sur des marchés étroits et fortement segmentés.

Enfin, une propension à la forte bureaucratisation et une faiblesse dans la hiérarchisation des priorités de développement et la crise de l'endettement extérieur des Etats Africains sont des facteurs qui bloquent la marche vers l'intégration.

2. Obstacles institutionnels

Sur le plan institutionnel, les expériences de démocratisation bien qu'ayant obtenues certains résultats, manifestent des signes d'essoufflement. Or, les différentes étapes d'une politique d'intégration doivent être ratifiées par les parlements afin d'avoir un contenu juridique qui sera une ardente obligation pour les Etats.

La démocratisation des institutions est essentielle pour intégration. Elle est une option de société avant d'obtenir l'assentiment de la majorité par le biais de la représentation nationale. C'est également une voie pour garantir la pérennité des traités signés par les Etats.

L'Espagne et le Portugal sont venus dans la Communauté Européenne après une période probatoire au cours de laquelle ils ont dans un premier temps démocratisé leurs institutions avant d'être reçus au sein de la grande famille européenne.

Par ailleurs, nous tenons à souligner que la bonne gouvernance est aussi un élément central de l'intégration, l'idée de gouvernance a fait fortune. Elle repose sur des normes internationales optimales de gestion des affaires publiques, en particulier l'impérieuse nécessité pour les gouvernements réputés souverains de gérer les affaires publiques selon le bien commun, mais aussi et surtout, ils doivent éviter une superposition d'instances de gestion, qui présentent des dangers pour eux-mêmes et pour les autres.

L'investissement direct étranger (IDE) ne rime pas avec la multiplicité des bureaux, c'est-à-dire la bureaucratie lourde

Un terreau de l'inefficacité économique est précisément la bureaucratie polymorphe, donc tatillonne. L'efficience et la croissance économiques dépendent de la bonne gestion des affaires publiques. Il est fondamental de créer des institutions capables de faire des transformations profondes du secteur public et lui imposer l'obligation de rendre compte.

Enfin, l'intégration économique en Afrique de l'Ouest, passe nécessairement par l'adoption par tous les Etats du principe de subsidiarité.

Elle offre l'architecture d'une industrie capable d'offrir des préférences africaines adaptées aux solidarités émergentes en Amérique et en Europe.

Ce qui peut être produit moins cher et de meilleure qualité par une entreprise dans une région d'une nation quelconque de l'union, ne doit plus être produit par une autre entreprise dans cette région, et, ce qu'une région peut produire efficacement au sein d'une nation au sein d'une union, ne doit plus être fait par une autre au sein de l'union. L'union, elle-même est seule habilitée à gérer la supranationalité, c'est-à-dire à l'imposer aux Etats, des obligations communes par le billet de l'acceptation par tous d'un transfert de souveraineté.

Une autre zone monétaire en gestation: La ZMAO

La création de la seconde zone monétaire en Afrique de l'Ouest a été décidée à Bamako en décembre 2000. L'idée au départ consistait à créer le 1er juillet 2005 une zone nouvelle par les pays de la CEDEAO qui ne font partie de la zone CFA avec l'ambition de faire une fusion avec ces derniers après une période de 4ans.

Les pays membres de la ZMAO veulent créer une nouvelle monnaie appelée ECO.

Il s'agit de la Gambie, du Libéria, de la Sierra Leone, du Ghana, du Nigéria et la Guinée seul pays francophone. . Très peu de ces pays ont des frontières communes contrairement aux pays de la Zone CFA.

Pour atteindre cet objectif, des critères de convergence ont été élaborés par l'IMAO (Institut Monétaire de l'Afrique de l'Ouest.

Les critères de 1er rang sont :

a. Le taux d'inflation (fin d'exercice) devait être de 1 chiffre en 2003 et de 5% à compter du 1er semestre 2004

b. Le déficit fiscal (dont exclus) devait être inférieur ou égal à 4% dès janvier 2003

c. Le financement du déficit par la banque centrale devait être limité à 10% des recettes fiscales de l'année précédente jusqu') fin décembre 2003 et 5% par la suite

d. Le niveau de réserves extérieures brutes devait être supérieur ou égal à 3 mois d'importation dès janvier 2003.

Les critères de second rang sont :

a. Le niveau des arriérés intérieurs devait être nul à fin 2005

b. Le ratio recettes fiscales/PIS devait être supérieur ou égal à 20% à fin 2005

c. Le ratio masse salariale/ recettes fiscales devait être supérieur ou égal à 35% fin 2005

d. La prime de change entre marché officiel et le marché non officiel devait être inférieure ou égal à 1 % à fin 2005

e. Le taux d'intérêt réel devait être positif à fin 2005

f. Le ratio d'investissement sur ressources propres / recettes fiscales devait être supérieur ou égal à 20% à fin 2005.

Il était prévu la réalisation de ces critères par les pays candidats pour réaliser la ZMAO dans un premier temps et devrait déboucher sur une fusion avec l'UEMOA pour avoir une monnaie unique et une banque centrale unique pour tous les pays de la CEDEAO.

Il est clair que la mise en œuvre de ce projet nécessite une discipline budgétaire que les pays membres ne semble pas respecter pour le moment.

La réalisation d'une union économique et monétaire en Afrique de l'Ouest est devenue un impératif;

La République de Guinée ayant des dotations en ressources naturelles et une diversité climatique favorable, tirera des avantages multiples en participant à cette solidarité.

Nous avons de sérieux atouts pour consolider les résultats obtenus depuis l'ouverture de notre économie sur les échanges extérieurs.


M. Sanoussy DABO

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